Près de trois mois après avoir succédé à Frank Klopas en tant qu’intérimaire, Mauro Biello a été confirmé au poste d’entraîneur pour la saison prochaine. Une décision qui n’a surpris personne puisque les résultats, décevants, déplorés par le club lors de sa nomination se sont nettement améliorés depuis qu’il a pris l’équipe en mains.
CONTRAT DE CONFIANCE
“Je sens que nous allons dans la bonne direction, a expliqué le président Joey Saputo au moment d’officialiser la nomination. Pour consolider l’avenir du club, nous avons décidé de nous tourner vers le passé. Mauro est un exemple parfait de ce que représente le club : passion, fierté, dévouement et un désir parfait de réussite. En très peu de temps et dans des conditions très difficiles, il a obtenu de très bons résultats. Il connaît mieux que personne la philosophie de l’équipe, les attentes des amateurs et la mentalité québécoise. Il aura carte blanche sur les décisions concernant les joueurs et le personnel d’entraîneurs. Quoi que réserve le futur, il y aura toujours une place pour Mauro dans cette organisation, où il a fait sa place comme joueur, comme leader et désormais comme entraîneur. En 23 ans avec l’Impact, il a une feuille de route remarquable.”
Quand il dit que la place de Biello est assurée, ce n’est pas vain, et c’est illustré par le type de contrat qu’il a signé. “J’ai parlé avec Mauro et lui ai demandé ce dont il avait besoin… Il est avec nous depuis 23 ans, il n’y a pas de limite à son rôle comme entraîneur. Ce n’est pas un contrat standard à durée déterminée. Ce n’est pas comme ça que je vois les choses. Il a eu différents rôles dans l’organisation et reçoit cette fois sa chance comme entraîneur. Il recevra le temps de mettre ensemble ce qu’il veut mettre ensemble. Le plan qu’on a est de regarder comment progresser sur les trois prochaines années. Mais Mauro ne sera pas avec l’organisation juste pour la durée de ce plan, mais pour le temps qu’il veut rester avec elle.” Voilà qui est dit.
Présent un jour avant les autres pour son bilan de saison, le principal intéressé faisait alors preuve de patience mais aussi d’assurance. “Notre philosophie au club est de gagner. Je suis content d’avoir pris le poste. J’aime ce que je fais et je vais continuer à faire ce que je peux pour aider l’équipe, disait alors Biello. On a décidé quand j’ai pris le poste qu’on allait en discuter à la fin de la saison. Je veux être de retour, je pense que le club le souhaite aussi.” Une journée plus tard, le contrat était signé.
LES JOUEURS NE SONT PAS SURPRIS
L’arrivée de Biello a semblé apporter une bouffée d’air frais dans le vestiaire. La reconduction du contrat de l’entraîneur n’avait donc rien de surprenant pour les joueurs. “On a bien fini la saison, Mauro a répondu aux attentes placées en lui et ses arguments parlent pour lui”, disait Patrice Bernier peu avant l’annonce officielle.
Même au moment de sa nomination, certains s’attendaient déjà à ce que ça se passe bien. Parmi eux, Evan Bush. “Je connais Mauro depuis 5 ans, expliquait le gardien de but. Ce n’était qu’une question de temps avant qu’il ne reçoive sa chance. Il a la bonne mentalité, gère bien son vestiaire, alors je n’ai pas été surpris par ce qu’il a fait quand il a pris l’équipe en charge.”
Et si certains parlent de l’effet Drogba, l’attaquant monte au créneau pour souligner les qualités de son entraîneur. “Si Mauro a eu ce genre de résultats, il ne le doit qu’à lui-même, à sa capacité à s’adapter au groupe, à répondre aux attentes et à fédérer les joueurs. C’est tout à son honneur, il faut reconnaître son mérite. Nous, les joueurs, on est à son service. La communication avec l’entraîneur est très importante, il s’en charge très bien.”
DU SPRINT DE 2015 AU MARATHON DE 2016
Si quand il était adjoint, il a tissé de bons liens avec les joueurs, à l’époque, il faisait office de relais entre les joueurs et l’entraîneur. Du jour au lendemain, la teneur de ses tâches a changé. Quand on lui demande quelle marche fut la plus haute à franchir, Biello explique : “L’adjoint fait le lien entre l’entraîneur et les joueurs. Là, j’avais des décisions à prendre. Quand elles étaient difficiles, j’en suis toujours revenu à mes sensations du moment. Ce feeling ressort car tu as fait le travail avant. Ça m’a beaucoup aidé.”
En quelques jours aussi, il a dû effectuer la transition entre des méthodes qui ne fonctionnaient pas et ses propres volontés. Sans avoir non plus le temps d’apporter des changements profonds. Comment s’y est-il pris ? “Si tu es capable de bien travailler, de transmettre aux joueurs ce que tu veux, de convaincre le groupe que ta méthode permettra d’atteindre tes buts, tu auras plus de chances d’avoir du succès. Mais même si tu te prépares au mieux de A à Z, ça ne te garantit pas la victoire.”
Désormais, Biello se retrouve dans une toute nouvelle situation. Après avoir dû parer au plus pressé, parfois dans l’urgence, et avec des courtes échéances, il a maintenant le temps de travailler à sa guise. Avec l’intersaison et la préparation de la saison 2016 devant lui, il pourra mettre en place un modèle de jeu à son image, construire le groupe de joueurs qu’il souhaite. Comment va-t-il s’y prendre ? En se basant sur ce qui est déjà en place ou en établissant d’abord un plan avant de choisir qui va l’appliquer selon sa vision ? Sa réponse est sans équivoque : « Il faut faire une bonne évaluation de ce qu’on a, de qui revient ou non. Alors, on aura une idée claire des profils qu’on aura, et on pourra commencer à bâtir à partir de ce moment-là. Je suis content de la manière dont s’est terminée cette année. On a de la qualité, de la jeunesse et de l’expérience. Avec tout ça, on a le potentiel pour bâtir quelque chose de bien. »
PRISE DE RISQUES ET DE RESPONSABILITÉS
Fin août, Biello n’avait pas autant de clefs en mains. Le fameux choc psychologique est tout sauf une garantie lors d’un remplacement d’entraîneur en cours de saison, et le nouveau venu doit faire avec les moyens du bord et reprendre un groupe souvent fragile laissé par son prédécesseur. Il n’y a qu’à voir comment Toronto s’est effondré un an plus tôt à l’arrivée de Greg Vanney, qui a cependant été confirmé pour cette saison où il a guidé l’équipe jusqu’en phase finale.
Saisir une chance qui ne se représenterait pas de sitôt constituait donc un risque pour Biello, et il en était conscient. “Quand j’ai pris le poste, je voulais juste me concentrer sur ce qu’il y avait devant moi. Je sais que dans ce métier, les chances ne se présentent pas souvent. Je ne savais pas si j’étais prêt, mais c’était une chance de mettre en place les choses que j’avais apprises, et je voulais la saisir.”
À en croire Saputo, son tour arriverait tôt ou tard. “Amener Mauro comme entraîneur a toujours été dans nos plans. Quand quelqu’un qui fait partie de l’organisation depuis si longtemps et en connaît la culture comme Mauro, on sait qu’il aura sa chance un jour.”
S’il avait confiance en son ancien joueur – sinon il ne lui aurait pas confié le poste –, le président redoutait de le mettre dans une situation compliquée, voire nuisible. “Je lui ai parlé à ce moment-là, en lui disant que ce serait difficile car si les choses allaient mal, il aurait risqué de brûler une chance qu’il attendait depuis plusieurs années. Il m’a dit qu’il était prêt à prendre ses responsabilités, même si ça devait lui faire mal. On a vu le changement de mentalité ensuite, et c’est à ce moment-là que j’ai me suis dit qu’il était prêt et j’étais content pour lui qu’il n’ait pas brûlé sa chance.”
COLORADO, ENCORE LE POINT TOURNANT
S’il fallait préciser la date de ce fameux “moment-là”, on pourrait parler de la victoire à Colorado. Un adversaire crucial pour les différents entraîneurs du club : Marsch y avait trouvé son entrejeu, c’est face à lui que les problèmes ont commencé pour Schällibaum et c’est là qu’en 2014 le discours de Klopas avait commencé à susciter de nombreux doutes.
Et pour Biello, alors ? “Comme entraîneur, il faut être créatif, explique l’intéressé. Quand les choses ne vont pas bien, il faut renverser le négatif. Si tu peux le renverser tout de suite, c’est important. Revenir avec les mêmes solutions quand ça va mal, ça peut faire durer le négatif et créer des doutes. Après nos défaites à Orlando et New York, je voulais tirer davantage de l’équipe, c’est dans ce genre de moments qu’il était important de montrer de la créativité et ça a marché à Colorado. C’est pour ce genre de choses que je dois continuer à grandir.”
Dans son discours, le directeur technique Adam Braz parlait aussi de ce match. “Mauro mérite à 100% sa nomination aujourd’hui. Il a fait de l’excellent travail, a amené à l’équipe la mentalité de se battre jusqu’à la fin même en étant menée, ses messages tactiques et ses messages aux joueurs étaient clairs et sont bien passés, ce qui a permis d’obtenir des résultats. Un moment crucial pour moi, c’est la victoire à Colorado après les défaites à Orlando et New York.”
Une fois de plus, donc, Biello a convaincu : tant ceux qui croyaient en lui mais voulaient évidemment voir des résultats, que les sceptiques. Ceux qui l’ont connu en début de carrière insistaient d’ailleurs sur le fait qu’à l’époque, bien du monde n’était pas convaincu de son avenir comme joueur professionnel. Alors, on ne peut lui souhaiter qu’une chose : réussir à en faire autant sur le banc qu’il en a fait sur le terrain pour le club de son cœur !
► Rejoignez la ligue ImpactSoccer.com