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Patrice Bernier : les secrets d'un grand capitaine

Posted on 14 February 2018

 impactmontreal.com
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Porter le brassard de capitaine est un honneur. Il était d’autant plus grand pour Patrice Bernier qu’il a pu le faire dans le club de sa ville de naissance. “Et puis en soccer, le capitaine est le premier joueur qui monte sur le terrain. C’est la première image qu’on voit, c’est assez fort. C’est une particularité du soccer que j’ai toujours aimée. Après, il y a l’échange avec le capitaine adverse au moment du tirage au sort”, confie le jeune retraité dont on connaîtra le successeur bientôt. À quelques jours de son évènement caritatif “Patrice Bernier et ses amis”, il a accepté de nous détailler les réalités concrètes quotidiennes d’un rôle emblématique où il faut, à ses yeux, être “meneur, rassembleur et exemplaire”.

Selon toi, par qui, comment et sur quels critères doit être choisi un capitaine ?

Avant tout, il doit être choisi parce qu’il a le respect de ses coéquipiers. Ce n’est pas parce que tu es l’élément clef de l’équipe que tu es celui qui va mener la troupe. Je pense d’ailleurs que Rémi Garde l’a dit lui aussi. Tu dois être capable de communiquer avec tes coéquipiers et d’être celui qui rassemble. Tu dois comprendre la réalité de chacun, aussi bien des titulaires que des remplaçants. Tu dois saisir la vie du vestiaire et la transmettre à l’entraîneur.

Y a-t-il parmi tes anciens capitaines quelqu’un qui a pu te servir d’exemple quand tu l’es devenu ?

Nicolai Stockholm, à Nordsjælland. Pas un gars de beaucoup de mots, mais toujours le premier à s’appliquer. Il ne transmettait jamais de sentiment de non-confiance. C’est important dans le sport d’élite. J’avais beaucoup de respect pour lui. À l’époque, j’étais vice-capitaine et on avait une bonne relation. J’ai remarqué la façon dont il agissait, retenu sa manière d’être. On se comportait de manière similaire, même si parfois il était plus sérieux. Je citerais aussi Davy Arnaud, qui a traversé des passages pas évidents pour lui en 2012 et en 2013. Ce sont des gens qui ont démontré qu'ils ne lâchaient pas, peu importe la situation.

Un capitaine a aussi besoin de “bras droits”. Qui t’a le plus épaulé ? Quel rôle jouaient-ils ?

Un groupe ne se gère pas tout seul. Je citerais d’abord Hassoun (Camara), car on se connaît depuis six ans et je pouvais toujours compter sur lui. Il y en a eu d’autres. Dans une réalité où les joueurs viennent d’un peu partout, il y en a souvent un qui fait passer le message à une des différentes branches de l’équipe, comme les plus jeunes, ceux qui viennent d’Europe, les Américains, etc. Nacho (Piatti) a rempli ce rôle avec les Argentins. Il y a aussi eu Laurent Ciman, Marco Di Vaio, Matteo Ferrari, Evan Bush. Des gens qui sont depuis longtemps dans l’équipe ou qui ont un gros CV. Parmi eux, Didier Drogba évidemment : il a beaucoup aidé quand il était là, grâce à son aura, à sa personnalité et au fait qu’il avait déjà été capitaine. Il jouait un rôle de grand frère, et quand tu l’as de ton côté, ça facilite les choses.

APPRENDRE LA LANGUE DU PAYS


Est-ce facile de souder un groupe hétéroclite de près de 30 joueurs ?

À Montréal, sans être difficile, ce n’est pas évident. Il y a des joueurs qui viennent d’un peu partout. Mais en ayant joué à l’étranger, je pouvais me mettre dans la peau de ceux qui arrivaient à Montréal. Je savais ce qui avait été fait, ou non, pour moi, et ça me permettait d’approcher les joueurs plus facilement afin de les aider à s’adapter. Car c’est important pour être performant sur le terrain. Je sais ce que c’est de ne pas parler la langue quand tu arrives quelque part. Je connais les rudiments d’arriver sur place et de devoir chercher un appartement, s’occuper de l’assurance maladie, trouver une épicerie. En étant passé par là, une fois capitaine, pour moi, ce n’était pas une obligation mais bien un devoir naturel.

Quels rôles jouent la langue, la culture et la nationalité dans l’unité d’une équipe ? Est-ce différent selon les pays où tu as joué ?

Il y a toujours une langue principale, soit celle de l’endroit, soit celle utilisée par l’entraîneur. Dans les autres pays où j’étais, c’était la langue du pays. Tu dois l’apprendre pour t’adapter : la majorité des joueurs la parlent. À l’Impact, l’anglais facilite les choses pour tout le monde. Je maîtrise l’anglais et le français, je pouvais aussi faire l’effort de communiquer dans d’autres langues comme l’espagnol ou l’italien – même si ce n’était pas joli – pour démontrer que j’étais là et que peu de choses pouvaient me bloquer au moment d’entrer en contact avec un coéquipier. Je maîtrisais aussi le norvégien et le danois, mais je ne les parle plus autant. C’était important car c’était la langue dans laquelle étaient donnés les entraînements : des équipiers t’aident, mais tu ne veux pas être dépendant d’eux pour comprendre ce qu’il se passe et assimiler rapidement. Et puis, quand tu apprends la langue, les joueurs locaux voient ton effort pour intégrer la réalité de l’endroit.

Être polyglotte semble devenu indispensable pour un capitaine moderne.

Oui, dans la réalité de la MLS avec des joueurs venus d’un peu partout. Il faut pouvoir communiquer avec l’entraîneur mais aussi avec les joueurs pour avoir le pouls du vestiaire. Il faut au moins maîtriser deux langues. À l’Impact, c’est rarement arrivé qu’un joueur ne parle qu’une langue dans laquelle ni moi ni personne d’autre au club n’était capable de communiquer. Et puis, l’Américanisme fait qu’on est souvent capable d’échanger en anglais.

SORTIR DE LA BULLE DU SPORT


Est-ce que tu as déjà participé à des activités hors-club entre joueurs sans en avoir forcément envie, mais juste pour mieux “sentir” le groupe et les liens ?

J’avais deux enfants et parfois je me disais que j’aurais été bien à la maison et que je n’avais pas nécessairement besoin de participer aux activités. J’aurais pu me reposer mentalement et être près de ma famille. Je faisais le sacrifice en me mettant dans les souliers du jeune que j’étais qui avait besoin de faire autre chose que rester à la maison. Ce sont des moments importants pour créer des liens. Les joueurs se parlent sur le terrain, mais c’est lors de ce genre d’activités qu’on aborde d’autres sujets. Des joueurs qui ne se pensaient pas compatibles ou ne se parlaient pas tant que ça, à cause parfois simplement de leur place sur le terrain ou dans le vestiaire, se sont découvert des points communs comme la mode, la musique, des endroits à visiter dans le monde ou leur façon de penser. Ces activités permettent de sortir de la bulle du sport et de la concurrence.

Quels moments en dehors du cadre du club ont le plus soudé le groupe, durant ton capitanat ?

En 2016, on est allé au paintball au milieu d’une saison qui, à ce moment-là, était correcte mais pas extraordinaire. Il manquait le petit quelque chose nous unissant encore plus. Dans l’équipe, l’état d’esprit n’était pas mauvais – à l’Impact, il ne l’a jamais été – mais on devait être plus conquérant. On a joué, on s’est amusé. Au sein des équipes, il fallait se souder pour aller “à la guerre” contre d’autres. C’est bien d’avoir une activité dont les caractéristiques et les valeurs sont similaires à celles de ton sport mais s’expriment dans un autre contexte. Après ça, on est parti sur une lancée et on a bien fini la saison. Ce n’est cependant pas toujours simple à organiser, entre ta situation personnelle et le calendrier chargé par les entraînements et les matches…

La première année, en 2012, on était tous nouveaux et on avait organisé un souper. En 2015, j’avais invité quelques joueurs à la maison pour Halloween. Cela a permis à certains qui le connaissaient mais ne l’avaient jamais vécu, comme Laurent Ciman et Didier Drogba, de le découvrir. C’était un bon moment.

L’intersaison est très long en MLS : faisais-tu quelque chose de spécial pour que les liens restent forts durant ces longs mois ?

Non, avec la réalité de la MLS, tu ne peux rien faire. Ça dure deux mois et demi, presque personne n’est ici, c’est tellement long. On essaye juste de faire un souper quand tout le monde revient.

“J’AI AUSSI ÉTÉ JEUNE…”


Parfois, un capitaine doit intervenir quand il y a des conflits au sein du groupe. Quand tu le faisais, comment ça se passait ?

Quand tu saisis qu’il y a divergences d’idées, tu interviens. Alors, il faut faire comprendre que chacun joue pour une équipe, un logo. Il est normal que tout le monde ne soit pas sur la même longueur d’ondes, ne vive pas la même réalité. Ton objectif est de comprendre la situation et de tenter de l’améliorer. Tu dois avoir un portrait global en restant toujours optimiste. Et le collectif doit primer, même si chacun se bat pour sa place dans l’équipe.

Quelle est la frontière entre les choses dont doit se mêler un capitaine et celles qui ne sont pas de son ressort ?

Il y a des sujets personnels que tu ne peux pas approfondir. En tant que capitaine, j’ai appris à ouvrir la porte sans forcer ni vouloir entrer dans les détails. Quand je voyais quelqu’un qui n’était pas dans son assiette, j’allais le voir et lui faisais savoir que j’étais là s’il avait besoin d’aide. Tu fais le premier geste, et après tu laisses venir. Parfois, quand tu le penses nécessaire, tu informes aussi un entraîneur d’une situation car généralement, il est surtout au courant des réalités du terrain. Et puis, j’ai aussi été jeune et je connais très bien Montréal… Je me vois mal donner des leçons à un jeune quand je suis aussi passé par là. Dans ce cas, je me contente de conseiller de ne pas en faire un excès.

Y a-t-il eu un joueur plus difficile à maîtriser que les autres ?

Pour être franc, il n’y a pas eu de pomme pourrie. Jamais il n’y a eu de joueur à qui il était impossible que je parle car il était dans son coin. Je ne sais pas si c’est parce que c’est moi… mais j’ai toujours pu communiquer avec tout le monde, même si certains étaient plus introvertis que d’autres. Peut-être que c’est ce qu’ils ont perçu de ma personnalité qui fait qu’on a toujours été capable de communiquer. Et puis, le fait d’avoir joué à l’étranger avant m’a fait comprendre que j’avais le devoir d’approcher les autres joueurs. Même ceux qui préfèrent rester assis dans leur coin du vestiaire et laisser le terrain s’exprimer pour eux : tu veux leur parler pour leur souhaiter la bienvenue dans le groupe. Ils doivent savoir que quand ils ne connaissent encore personne, ils peuvent déjà compter sur moi. Et que je serai toujours là pour répondre à leurs questions, même une fois qu’ils se seront fait des amis. C’était important d’être un pion de départ montrant aux nouveaux que je comprenais leur situation. Ensuite, les nouveaux s’approchaient d’autres joueurs et ça devenait plus facile.

Quelle chose as-tu faite dans ta carrière qui fâcherait le plus le capitaine Patrice Bernier d’hier ?

Je ne pense pas qu’il y en ait… J’ai toujours été conscient qu’il fallait respecter ce que faisaient les anciens. J’ai toujours eu le sens du collectif, de la hiérarchie dans le sport. J’ai toujours voulu me concentrer sur le foot et veillé à ne rien faire qui affecterait mes prestations. Je ne me souviens pas de quelque chose qui aurait pu froisser le capitaine que je suis ensuite devenu.

LA PÉRIODE KLOPAS


À quel point est-ce plus difficile pour un capitaine de remplir les tâches qui lui incombent quand il a d’autres préoccupations (comme gagner sa place par exemple) ?

C’est pas évident ! Tu es entre deux chaises. Les gens comprendraient que tu ne fasses rien, et tes coéquipiers l’accepteraient facilement. Durant la période Klopas, j’étais à Montréal, chez moi, j’avais reçu le brassard de capitaine pour certaines raisons, et j’avais dit clairement que ce titre représentait quelque chose. Ma situation de joueur disait que je n’étais pas considéré comme étant important et m’aurait permis de dire que je n’avais pas besoin de porter le groupe, mais je n’ai pas arrêté de le faire pour autant. Si j’avais été plus jeune, et moins conscient du collectif et de la dynamique de groupe, j’aurais peut-être agi différemment. Ce qui permet aussi de passer à travers de genre d’évènement, c’est la fraternité avec les joueurs, quand tu es capable de rigoler avec les autres dans le vestiaire. Mais c’est pas évident… (NdlA : on sent beaucoup d’émotion dans la voix de Bernier pendant qu’il répond) Tu pourrais ne rien faire et te dire qu’on t’a enlevé le pouvoir : tu ne l’as plus sur le terrain, c’est vrai, mais tu as toujours celui d’influencer, d’être connecté au groupe et de faire passer des messages, même à ceux qui jouent. Et en montrant que tu passes par-dessus cette situation, tu gagnes encore plus de respect.

Et comment on arrive à être relais de son entraîneur quand on n’est pas sur la même longueur d’ondes ?

(Toujours ému) La relation de l’entraîneur avec le capitaine est importante, car c’est lui qui lie le groupe, il peut lui transmettre sa façon de voir. Si ça ne va pas bien et que le capitaine lâche aussi… alors c’est fini. S’il reste une chose à laquelle se raccrocher, c’est que le capitaine ne lâche pas. C’est dans l’essence du mot capitaine, comme le capitaine du navire. Il est un peu le porte-étendard du groupe. S’il ne dit pas la même chose que l’entraîneur, ça démontre quelque chose. On commence à voir qu’il y a une divergence entre ce que les joueurs sont et ce que le coach pense. Il vaut mieux que les deux soient sur la même longueur d’ondes.

En match, le capitaine est aussi le lien avec les arbitres.

Et c’est lui qui doit tout apaiser. Il y a le banc, très nerveux, et l’arbitre. Et tu dois gérer les membres de ton propre club en fonction de l’arbitrage. Ça joue sur l’état d’esprit de l’arbitre et sa perception de ton équipe. Pour le capitaine, c’est important de toujours avoir une connexion avec lui. Ça ne fera pas aller ses décisions dans ton sens, mais au moins il ne se mettra pas en tête de faire pencher la balance de l’autre côté en raison de l’état d’esprit des équipes. C’est important d’avoir une bonne relation avec lui pour ne pas partir perdant face à un arbitre sur la défensive.
Matthias Van Halst
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