Bilans de saison 2014 (7) : le jeu

Publié le 3 décembre 2014

 Rogerio Barbosa/impactmontreal.com
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Comme lors des deux saisons précédentes, l’outil Vision du Jeu et son fondateur Christian Schaekels m’ont aidé à analyser le jeu de l’Impact. Ce bilan est basé sur les données recueillies et leur interprétation : vous y relirez donc en bonne partie ce qui a déjà été expliqué lors de l’émission Coup Franc (lien en bas de texte), mais vous découvrirez aussi d’autres aspects que l’on détecte en examinant les chiffres en profondeur.

CONTRE-NATURE


Depuis son arrivée en MLS, Montréal a toujours été efficace offensivement de la même manière : dans la vitesse. Cependant, cette saison, le mot efficacité prend un double sens, et il y a en outre un “mais” de taille. Jamais, en trois ans, l’Impact n’a marqué aussi peu de buts : 38 (contre 45 en 2012 et 50 en 2013). Jamais, en trois ans, l’Impact n’a marqué autant de buts en attaque posée (c’est-à-dire en possession de balle à un rythme constant) : 18 (contre 9 en 2012 et 13 en 2013). C’est là qu’intervient le double sens : lors de l’ensemble des rencontres où l’équipe a marqué un de ses 18 buts sur attaque posée cette saison, elle a pris 8 points. Dans les mêmes circonstances, et avec moins de buts l’an dernier, elle en avait pris 20. Et avec la moitié du total en 2012, ce sont des matches où elle avait pris 13 points. 13, c’est d’ailleurs le nombre de buts marqués par Montréal en reconversion rapide (contre-attaque) cette année. Dans des rencontres lors desquelles il a pris un total de 17 points. Voilà qui en dit très long sur la nature de l’équipe.

Le “mais” de taille, c’est la répartition de ces buts sur la saison. Pour arriver au total de 39, il faut ajouter 7 buts sur attaque accélérée (toujours après une possession de balle, mais quand la vitesse d’un joueur ou de transition du ballon fait la différence face à un adversaire pas tout à fait en place), pour arriver à un total de 20 buts dans la vitesse et 18 dans le jeu posé. Le 16 août contre Chicago, Di Vaio a marqué le seul but du match sur contre-attaque pour mettre fin à une longue série de défaites. Depuis lors, l’impression générale est que l’équipe va mieux. Elle a dès lors pris 14 points en 12 matches, ce qui n’est pas génial, mais ça reste sa meilleure période de la saison. Et voilà ce que les chiffres nous disent : durant cette période, seuls 4 des 18 buts en attaque posée ont été inscrits, alors qu’on a assisté à 14 des 20 buts dans le jeu en vitesse. Ne remettre en application un principe de jeu dont tout le monde était censé savoir qu’il a toujours été la grande force de l’équipe (ce n’est pas faute de l’avoir souligné et surligné de toutes les couleurs ici et ailleurs depuis plus de deux ans) relève de la faute grave, et c’est une responsabilité qui incombe au staff technique.

Ce dernier a aussi la responsabilité du travail des phases arrêtées. Je ne m’attarderai pas longuement sur le fait que l’Impact n’en a marqué aucune en championnat cette saison : ni sur penalty, ni sur rentrée en touche, ni sur corner, ni sur coup franc joué de manière directe ou indirecte. Certes, cela n’a jamais été une des forces de l’équipe par le passé, mais Camara, Ferrari, Felipe, Mapp ou Ouimette étaient capables d’être au bon endroit l’an dernier, et c’était aussi une des forces de McInerney à Philadelphie. Mettre le blâme sur les joueurs et la malchance est une excuse facile.

Quant aux penalties, pour s’en procurer, il faut se retrouver souvent dans le grand rectangle adverse. Quand on sait que seulement 7 buts de l’Impact ont été créés dans la zone entre le but et l’entrée du rectangle sur toute la largeur du terrain (ce qui représente 18% des buts, alors que la deuxième plus mauvaise équipe est à 31%), on se doute bien que les hommes de Frank Klopas n’ont guère été menaçants ni présents en zone de finition. Ce qui se confirme par le fait que la passe à l’origine de 13 des buts marqués par l’Impact ait été donnée à la hauteur du rond central ou plus loin encore : personne en MLS n’en fait autant ! Salt Lake, réputé pour faire le jeu dans le camp de l’adversaire, a même fini la saison régulière à zéro. L’incapacité de faire reculer l’adversaire (ce qui laisse de l’espace pour tirer de loin) se note aussi par le nombre famélique de buts inscrits depuis l’extérieur du rectangle.

ENCORE PLUS UNIDIMENSIONNEL


L’an dernier, l’analyse du jeu de l’équipe avait stigmatisé que 50% de ses buts avaient la même origine, ce qui est énorme : elle était la seule avec un ratio aussi élevé, ce qui démontrait son aspect unidimensionnel. Cette origine était l’axe dans le cours du jeu, et rien n’a changé, au contraire : cette année, 21 buts sont venus de là (soit 55%) et 26 buts (68% !) ont pour origine une “simple” passe (en opposition, par exemple, à un centre ou un coup franc). Il y a plus varié pour se rendre au but adverse, vous l’avouerez. Par contre, alors qu’ils étaient les pierres angulaires de ce système lors des deux premières saisons, Felipe recule et Bernier disparaît presque complètement des meilleurs donneurs de dernière passe dans cette situation de jeu. Ils sont remplacés par… Marco Di Vaio.

Cela en dit long sur le rôle différent qu’il a eu cette saison dans l’équipe. Ah oui, on a bien moins stressé de le voir sans cesse à la limite du hors-jeu. Mais il a été moins efficace. Sa marque de fabrique, et une des forces de l’équipe tant en 2012 qu’en 2013, c’était d’être lancé seul face au gardien adverse. C’est arrivé très rarement cette saison, tant pour lui que pour ses coéquipiers. L’Italien a même été plus souvent décisif pour envoyer un partenaire en face à face que pour marquer sur cette situation ! Il reste quand même parmi les meilleurs buteurs de MLS suite à une “simple” passe.

MAPP AU SOMMET DE LA MLS


Sur les ailes, on note encore un flagrant déséquilibre. Le flanc gauche offensif est, pour une troisième saison consécutive, l’un des plus faibles du championnat. Il en va de même pour les centres dans leur ensemble, le jeu de tête et la domination dans le petit rectangle adverse. Sur la droite, en revanche, l’équipe s’en sort honorablement, et ce grâce à Mapp. Ce dernier n’est nul autre que le meilleur donneur de passes décisives venues de ce côté durant la saison régulière de MLS !

Il a cette démontré des progrès en vitesse d’exécution (celle de réflexion était déjà là) et en maîtrise dans les petits espaces. Ce qui en fait aussi le meilleur donneur de passes décisives sur attaque posée de la saison régulière : dans ce domaine, il a fait jeu égal avec Donovan et Keane, des maîtres en la matière. Mapp est aussi le deuxième meilleur centreur de la compétition, derrière Keane. Et ses passes auraient dû rapporter gros : données à tout moment du match (de la 10e à la 80e minute), elles ont mené à des buts importants. Ce n’est pas compliqué : si le coup de sifflet final avait été donné après les 8 buts offerts par Mapp, l’Impact aurait pris 18 points sur 24. Mais au bout du compte, il n’en a pris que 6… S’il y en a un qui peut s’estimer frustré d’avoir vu ses équipiers bousiller ses efforts, c’est bien lui, alors que de son côté, il a bien su évoluer et s’adapter.

Et tout cela, en étant absent pendant plus du tiers de la compétition… C’est d’ailleurs peut-être ce qui l’a empêché d’être élu joueur de l’année. Le titre est revenu à Romero, dont un des mérites est d’avoir marqué suite à deux superbes solos (à Colorado et contre DC United). Ajoutez-y celui de Piatti contre Columbus, et vous avez un total qui fait de l’Impact une des équipes les plus prolifiques en la matière. Le joueur désigné argentin a peu joué, et a surtout été efficace grâce à ses buts en contre-attaque. On verra si ça se confirme la saison prochaine.

Autre bonne note de cette saison, les buts marqués en première mi-temps : seules 5 équipes ont fait mieux. Statistique particulière : Felipe fait partie des meilleurs donneurs de passes décisives dans le troisième quart d’heure du match. Ça reste bien léger pour celui qui, avec Bernier, dominait des catégories bien plus parlantes au cours des saisons précédentes. Mais faut-il vraiment en vouloir aux joueurs, ou plutôt à un modèle de jeu où ils pouvaient beaucoup plus difficilement se mettre en valeur ?

À LA MI-TEMPS, TOUT S’EFFONDRE ; DERRIÈRE AUSSI


Si les 45 premières minutes étaient prolifiques offensivement, elles étaient aussi sources de nombreux buts encaissés : 24 pour, 27 contre… et là, trois équipes seulement font pire. La pause était évidemment l’occasion pour l’entraîneur d’apporter les ajustements nécessaires pour garder l’avance, la prendre ou recoller au score. Mais les retours sur le terrain ont été des plus calamiteux : seulement 2 buts marqués en 34 matches lors du premier quart d’heure de la deuxième mi-temps ! Et 3 lors du quart d’heure suivant. Inversement, elle y a encaissé 10 puis 12 buts. Mais que pouvait-il bien se passer (ou ne pas se passer) dans ce vestiaire pour que tout s’effondre si régulièrement à ce point-là ? C’est un point très inquiétant.

Acculé dans son camp, l’Impact était incapable d’y gérer l’adversaire, qui pouvait lui faire prendre l’eau de presque partout. Ainsi, il était très aisé de manœuvrer dans les quinze derniers mètres de l’équipe, pour y centrer, s’y créer des phases arrêtées ou concrétiser ces dernières. Car à ce niveau, on se serait cru revenu en 2012 : si on fait la différence entre les buts marqués et encaissés sur phase arrêtée, l’Impact est loin, très loin dernier. L’absence de Nesta et un Perkins moins impérial peuvent être une partie de l’explication, mais ne justifient pas tout. Dans le cours du jeu, les ballons au cordeau (ces ballons au sol venus des côtés sur lesquels surgit le buteur) étaient un véritable calvaire.

Mais l’adversaire pouvait tout aussi facilement manœuvrer entre le grand rectangle et le rond central. Dès que l’autre équipe était en possession de balle, l’Impact allait au devant de problèmes. Et si l’an dernier (peut-être en raison de ses propres principes de jeu travaillés à l’entraînement), la défense montréalaise était capable de parer aux accélérations adverses, cette année, que les attaques soient posées ou accélérées, l’arrière-garde finissait toujours par craquer.

Peu importe la position des blocs, celui de l’Impact n’avait jamais le dessus. Et cela se matérialisait par des buts à profusion tant sur centres que sur passes, venus de partout verticalement, de l’axe et de la gauche horizontalement. Trouver mieux que Brovsky était faisable, mais l’an dernier, au moins, il bloquait son couloir. Le laisser partir en y ouvrant un trou béant n’a pas été la décision sportive la plus judicieuse. Nul besoin non plus de s’attarder sur les débordements presque inexistants des arrières latéraux, même s’ils convient de dire que Miller a montré quelques signes encourageants.

LE PETIT RECTANGLE, RARE ZONE SÛRE


Dans le cours du jeu (car trop de buts sur phases arrêtées sont venus de ce côté), le flanc droit défensif est une des seules réelles satisfactions de la saison, d’autant qu’il s’agit d’une confirmation depuis l’année dernière. Camara l’a occupé la plupart du temps et n’a, cette fois, pas connu de gros passage à vide. L’autre réelle satisfaction défensive, qui est aussi une confirmation, c’est la maîtrise du petit rectangle, même si de bon élève, l’Impact s’est rapproché de la moyenne. À noter : les dix buts encaissés de cet endroit du terrain ont été marqués de manière équitable sur deux périodes bien claires : cinq entre le 23 mars et le 19 avril, cinq entre le 2 août et le 10 septembre.

Dernier point défensif dont les chiffres sont en amélioration : les buts encaissés sur contre-attaque. Ce qui n’est, en soit, pas si surprenant que ça : l’an dernier, l’équipe construisait beaucoup de l’arrière et, manquant de solutions au milieu, se faisait prendre sur des erreurs individuelles. Cette saison, ce genre de prise de risques a été limité. Ce qui n’a pas empêché de nombreuses erreurs qui ont découlé sur un but adverse, mais ce n’était pas forcément sur des contre-attaques.

Pour en finir avec les problèmes de positionnement du bloc, deux autres situations arrivées fréquemment, et a priori contradictoires. Souvent trop bas, le bloc laissait des espaces aux adversaires pour tirer, et marquer, de loin. On l’a dit et répété, personne n’a fait pire en MLS : les frappes à distance ont fait mal du premier match à Dallas au dernier à DC United. Mais dès que le bloc montait trop, il se faisait prendre dans son dos, avec un adversaire lancé seul face au gardien : dans ce domaine non plus, personne n’a fait pire. Et ça aussi s’est vu du début (premier but encaissé à Dallas) à la fin de la saison (le but de Davies au stade Saputo).

CONCLUSION


Défensivement, les deux forces réelles ont été la maîtrise du petit rectangle et la bonne tenue du flanc droit dans le cours du jeu, avec également une propension à éviter les situations où l’adversaire pouvait contre-attaquer. Les faiblesses, elles, ont été innombrables : l’Impact laissait son opposant tant développer son jeu qu’accélérer dans sa moitié de terrain, était aussi friable sur les centres que les “simples” passes et les phases arrêtées, se faisant manger aussi bien dans l’axe qu’à gauche dans le cours du jeu, avait d’énormes problèmes de positionnement collectif, subissant autant des tirs de loin que des joueurs pouvant filer seuls face au gardien, et ce, presque à tout moment du match. Inclure tous ces problèmes dans un seul but est évidemment impossible, alors, pour en illustrer le plus possible d’un coup, j’ai choisi le but égalisateur de Barnes à Houston.



Offensivement, le modèle efficace ne change pas depuis 2012 : le jeu dans la vitesse, dans l’axe et suite à des passes. Il faut y ajouter des buts qui sont créés très loin de la zone de conclusion, et retirer la facilité à placer un joueur seul face au gardien adverse. Outre sur les phases arrêtées, les problèmes majeurs ont été de manœuvrer près du but adverse, la maîtrise du petit rectangle, les tirs de loin, les centres, le flanc gauche et le jeu de tête. Pour illustrer le tout, le but contre DC United amorcé par une longue passe au sol de Camara et conclu par McInerney d’un tir croisé, autre spécialité montréalaise.



Les bilans de la saison sur impactsoccer.com
1. Le bilan du club
2. Le bilan de l’émission Coup Franc
3. Aperçu général
4. Évaluations individuelles
5. Quelle évolution en un an ?
6. Stats en vrac
M. V.H.
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